Conversation surprise récemment entre un sympathique grand père, un de ces passionnés qui au fil des ans s’est intéressé à toute la production automobile et un jeune homme de ses amis, amoureux de Porsche, lui faisant découvrir son nouvel achat : un Boxster,
Dis moi petit c’est une belle voiture, elle me rappelle un peu celle de James Dean, à combien l’as-tu montée ? demande-t-il curieux.
Euh… ben .. a vrai dire je ne vois pas où je pourrais faire cet essai, je n’ai que la notice constructeur pour savoir, elle indique 258 km/h …
N’empêche qu’avec une telle merveille tu dois faire de sacrées moyennes.
Euh… ben .. a vrai dire, tu sais les moyennes on n’en parle plus beaucoup avec les encombrements, les bouchons et les contrôles de vitesse cette notion n’est plus d’actualité.
Tu connais mon amour de la belle mécanique et ma joie de soulever un capot, montre moi le moteur.
Euh… ben .. a vrai dire je sais qu’il est la dessous, mais moi-même je ne l’ai jamais vu et je suis bien en peine de te le faire admirer.
Toujours est-il que je constate que la sonorité à l’échappement est bien sympathique tu dois te régaler avec le talon pointe
Euh… ben .. a vrai dire l’électronique s’en charge et je ne pratique plus cet exercice
La passion ne serait-elle plus ce qu’elle était ?
Elle ne se nourrit plus de triples corps Weber ou Solex comme sur les premières 911, et de la magie de leur réglage à l’oreille ou au toucher (1) A l’heure actuelle ce n’est pas la contemplation d’un boitier d’injection électronique qui va susciter émerveillement et fascination, celui de la dernière 991 est-il si différent de celui d’une Logan, l’œil est frustré et c’est l’intellect qui sera peut être touché par la sophistiquée mais nébuleuse électronique.
Il en va de même pour toutes les aides électroniques à la conduite, ABS, anti patinage, correction de trajectoire, avertissement de franchissement de ligne, nous apprécions l’intérêt pratique sans que cela soulève notre passion. Eventuellement un petit bouton au tableau de bord nous permet de nous libérer, ou bien, en payant plus cher, il est vrai, on peut se tourner vers une GT3 « garantie sans aide à la conduite ».
L’introduction massive d’électronique dans l’automobile, la conception assistée par ordinateur pour toutes les marques et tous les modèles, l’importance des équipementiers fournissant tous les constructeurs, tout ceci a contribué à une certaine uniformisation.
Le temps ou une anglaise, Jaquar E, Triump TR3, TR4, se différentiait totalement d’une italienne, Alfa Roméo Ferrari ou Masserati, une française comme l’Alpine d’une américaine Mustang Corvette, Thunderbirth ou d’une japonaise, Honda etc… est bien fini. Les couleurs elles mêmes étaient de la partie, bleu pour la France, gris métal pour l’Allemagne, vert pour les anglaises et bien sur rouge pour les italiennes.
Plus aucun nom de contemporain n’est associé à une voiture comme ce fut le cas pour Bugatti ou Gordini
Que ce soit pour le moteur et le châssis ou même pour le dessin de la carrosserie, la mondialisation est en marche. La technologie est partagée par des pays de plus en plus nombreux et bien souvent inattendus, le design est international, les ordinateurs moulinent sur les mêmes logiciels, les voitures se ressemblent.
On ne découvre plus les voitures en les regardant, on les radiographie dans les revues ou sur internet, on n’essaie plus les voitures, on lit les essais, on ne pilotera bientôt plus une sportive sur un circuit, les simulateurs sont très réalistes et tellement plus surs.
Nous sommes à l’ère du virtuel, d’ailleurs c’est vrai dans tous les domaines : pour savoir s’il fait beau on n’ouvre plus les volets on regarde la météo sur son portable !
Mais la passion demeure, indestructible, en partie en se tournant vers le passé, pour l’automobile en général ou encore en se focalisant sur une marque ou même un modèle en particulier.
Dans ce dernier cas, Porsche est vraisemblablement la marque qui draine le plus de ces passionnés, la spécificité de la 911 y est pour beaucoup, le volume de la production – pour une voiture d’exception - et la longévité des voitures dont beaucoup restent en circulation, grâce à leur qualité de fabrication y contribuent aussi.
Et quand ces passionnés se reconnaissent entre eux ils forment ce que l’on appelle un Club….
Les voitures de sport en général sont les plus attractives, mais c’est aussi l’originalité d’un modèle qui regroupe les passionnés dans des clubs spécifiques, par exemple c’est le cas de la 2 ch, de la Méhari de la traction de la DS, toutes Citroën, marque certainement la plus innovante en voitures de production mais elle n’est pas la seule.
Heureusement pour les passionnés d’automobile quelques rares constructeurs continuent à garder une certaine personnalité à leur production, certains comme Alpine jettent un regard dans le rétroviseur.
Entre mécanique du passé, histoire des marques et des hommes qui les ont crées et maintenant nouvelles technologies la passion automobile n’est pas prête de s’éteindre.
Notre grand père admirant le Boxster pourra longuement dialoguer avec son jeune propriétaire et soyons sur que les échanges seront riches et passionnants.
Michel Goudouneche
(1) en 1967 le mécano Porsche des Ets Mauriés à Toulouse était sourd, (il lisait sur les lèvres) il réglait les deux triples corps des 911une main sur le bloc moteur l’autre au tournevis